L’artiste Angelica Hicks réinvente un imprimé Simrane

Une fois encore, Simrane donne la parole aux artistes. Pour l’été 2022, la brillante illustratrice anglo-italienne Angelica Hicks s’est amusée à recréer un de nos imprimés exclusifs : le « City Palace ». L’artiste a voulu rendre hommage à travers son dessin à la parfaite imperfection de nos tissus où chaque impression au bloc de bois crée un motif unique. 

Angelica est passionnée par le textile et les gestes experts de l’artisan, l’aquarelle est son médium de prédilection. Elle connait la marque Simrane depuis toujours et a accepté notre invitation pour la création d’une illustration unique. 

A partir de son dessin exclusif nous avons imprimé en France une série limitée de 80 T-shirts 100 % coton pour célébrer la relation toujours inspirante de Simrane avec les artistes.

L’interview d’Angelica Hicks a été réalisée par une autre artiste, Julia Felsenthal (son Instagram : @julesandbinoculars )

#artysimrane


Angelica, vous êtes particulièrement inspirée dans votre travail par les tissus et les imprimés. Vous êtes aussi la petite-fille du grand designer textile David Hicks. Pouvez-vous nous parler un peu plus de cet héritage ? 

J’en suis très fière ! Mon grand-père est incroyable. Pas forcément une inspiration directe car je ne suis pas architecte d’intérieur mais plutôt une personne inspirante. J’admire la confiance dans son propre style et sa créativité, j’espère en avoir hérité d’une certaine manière. Il était son propre agent de relations publiques ! Il n’avait peur de rien et osait des choses que personne n’avait fait avant, c’est très fort. 

Vous a-t-il transmis un amour des imprimés ? 

C’est sûr. Quand j’avais 14 ans, je manquais de confiance en moi, j’étais très « monochrome ». Mais dès que mes yeux ont découvert le vintage …. J’ai eu de la chance de grandir dans une famille où chaque individu avait un style très affirmé. Je suis aussi la seule des petits-enfants à avoir connu mon grand-père. Je me souviens très bien d’une scène : lui et moi dans une voiture à la campagne, roulant au milieu de champs de jonquilles. Il disait : « c’est moche les jonquilles, ce n’est pas du tout le BON jaune. Mort aux jonquilles ! ». Moi, petite sur le siège avant, je criais comme lui : « mort aux jonquilles ». C’était un moment formateur. 

Je pense qu’un mélange d’imprimés peut parfois manquer d’harmonie mais c’est une notion tellement subjective. J’aime les mixer, que ce soit à la maison ou pour les vêtements. Plus c’est mélangé et plus il y a de contrastes, le mieux c’est. 

Qu’est-ce qui vous inspire dans la technique d’impression au bloc de bois ? 

L’artisanat et le fait de voir réellement le travail de l’artisan, les imperfections parfaites. Avant d’être illustratrice, j’ai adoré la sérigraphie sur soie car ce sont deux pratiques similaires :  les irrégularités font de chaque pièce une pièce unique. On devine la main de l’artisan. Il y a de la place pour la singularité. 

“Le jeu entre les mots et les dessins m’a toujours inspirée. L’illustration est une pratique joyeuse.”

Dites-nous-en un peu plus sur la création de votre illustration pour Simrane ? 

J’ai été tout de suite été inspirée par cette spécificité de l’impression au bloc qui fait de chaque pièce une pièce unique. L’équipe de chez Simrane m’a présenté des échantillons et je me suis dit que je pouvais soit simplement en refaire un à l’aquarelle soit en faire un trompe-l’œil pour donner un effet de mouvement et créer quelque chose de nouveau. J’ai choisi l’imprimé qui marcherait le mieux avec cette envie d’illusion. La partie centrale du dessin a été ajouté au dessin existant. La façon dont le dessin ondule, c’est exactement ça que je recherchais. J’ai trouvé ça sympa de recréer quelque chose comme ça sur une surface plane. Je suis curieuse de voir l’effet que ça donnera quand on le portera. 

Votre travail est très ludique et basé sur des jeux de mots. Vous assumez complètement votre sens de l’humour, avez-vous toujours été ainsi ? 

Je n’étais pas cool à l’école mais je n’aimais pas non plus les gens cool. J’étais plutôt timide et rougissais facilement. Je me lâchais sur Facebook ! J’ai commencé à faire des illustrations quand j’avais 21 ans. A cette époque, j’étudiais l’histoire de l’art à l’University College London. Le circuit académique n’était pas pour moi. Je ne voulais pas faire d’école d’art à cause de cette famille créative. Je pensais à la finance ou quelque chose comme ça mais ça n’a pas marché. Les derniers mois à l’université, j’avais vraiment besoin de quelque chose qui m’excite ; aller tous les matins à la bibliothèque ce n’était pas trop mon truc. Alors j’ai commencé à faire des illustrations de mode. Je me suis dit qu’il n’avait pas beaucoup d’humour dans ce secteur. Tout était tellement romantique et gracieux, je ne m’y retrouvais pas. Particulièrement sur Instagram, c’était une drôle de mode. Je me souviens, c’était le mois de février et Alessandro Michele commençait chez Gucci. Je me suis dit « whaou » : c’est fort et différent de tout ce qu’on voit en ce moment. Il fallait voir ces grosses lunettes ! J’ai senti qu’il se passait quelque chose de spécial. Ce que je ne pouvais pas me permettre en tant qu’étudiante en histoire de l’art, je l’ai exploré avec l’illustration et la mode.

Vous avez fini par faire ce que vous ne vouliez pas faire…

C’est sûr. Si je n’avais pas étudié l’histoire de l’art, si j’étais allée en école d’art, je ne pense pas que je ferais ce que je fais aujourd’hui. Les frustrations peuvent être constructives. 

Y a-t-il des artistes et des designers qui vous ont influencés, qui vous ont aidé à élaborer votre pratique artistique ? 

J’ai adoré le livre pour enfants « Cautionary tales for Children » d’Hilaire Belloc illustré par Basil Temple Blackwood. Quand j’étais jeune, je n’étais pas très attirée par les bandes-dessinées. Il me semble que j’ai un peu affabulé à ce sujet dans de précédentes interviews ! En fait j’étais plus inspirée par les livres pour enfants. Les bulles des bandes-dessinées m’ennuient. Quand je dessine des bulles c’est plus comme un dessin animé qu’une bande-dessinée. Plus tard j’ai été influencée par Raymond Pettibon. Récemment par Rose Wylie. Louise Bourgeois aussi mais quand j’étais plus jeune. Je crois qu’insconsciemment le jeu entre les mots et les dessins est quelque chose qui m’a toujours inspiré. L’illustration est une pratique joyeuse. D’ailleurs c’était l’idée pour Simrane, faire quelque chose de drôle et joyeux grâce au trompe-l’œil. 

Ressentez-vous cette frontière que les gens établissent entre artistes et illustrateurs ? 

Complètement. J’ai deux amis artistes, ils travaillent bien. L’un me dit : « tu es illustratrice », l’autre me dit « tu es artiste. L’illustration est un art ». J’imagine que si quelqu’un écrit un livre pour enfants et viens me voir pour que je l’illustre alors là effectivement c’est de l’illustration. Si on vous donne une liberté créative, si vous êtes à l’origine du concept créatif alors là c’est de l’art, n’est-ce pas ? 

J’ai vu votre appartement dans des magazines, vous êtes aussi intéressée par la décoration. Êtes-vous plutôt casanière? Qu’est ce qui nourrit votre inspiration au quotidien ? 

J’ai emménagé dans mon appartement actuel à Carroll Gardens, à Brooklyn avec mon ami il y a un an. J’aime avoir mes dessins sur les murs et élaborer le décor de mon appartement avec mon travail. [Elle montre un abat-jour qu’elle a repeint avec des silhouettes de personnages dans le style XIXème]. J’ai peint cet abat-jour parce qu’il était sale et qu’il fallait le recouvrir. [Elle montre une table peinte en damier]. J’ai trouvé cette table dans la rue, je l’ai sablé et repeinte. Nous avons une grande table qui remplit la totalité de la cuisine où je prépare des raviolis pour 8 personnes. Juste au-dessus de la table, il y a une peinture de mon grand-père qui regarde tout ce monde en les critiquant. [rires]

J’ai un studio qui est aussi un bureau dans Downtown Brooklyn à 20 minutes à pied, c’est une jolie promenade. J’ai enfin deux endroits séparés pour vivre et travailler. J’adore avoir des amis à la maison, elle est petite mais je l’adore. On s’y sent bien et j’aime bien partager ça avec les autres. Je loue toujours mais je repeins les murs : on peut toujours repeindre quand on part. J’ai envie de dessiner un arbre au-dessus du lit. Nous avons ces deux [vrais] arbres un peu bêtes de chaque côté du lit, ça serait drôle d’avoir les vrais et les faux. Avant ça je n’avais jamais eu des plantes à la maison. Je me disais c’est un peu ridicule tous ces gens à New-York qui ont des plantes. J’étais un peu comme mon grand-père. Mais la vérité c’est que c’est très agréable. C’est plaisant de les arroser, ça prend du temps mais c’est quasiment un moment méditatif. On ne peut rien faire d’autre en même temps. 

Découvrez le T-shirt Angelica Hicks x Simrane


Angelica Hicks est une illustratrice basée à New-York. Elle a collaboré avec de nombreuses marques et institutions notamment GUCCI et le METROPOLITAN MUSEUM of ART. Son premier livre « Tongue in Chic » a été publié en 2017. Son compte Instagram est @angelicahicks.